Amandine Glévarec – Coucou David, d’où viens-tu ??
David Meulemans – Hello ! J’ai fait des études de philosophie à Paris, puis à Aix-en-Provence. Pendant ces années, j’ai eu la chance de faire deux séjours, d’une année chacun, aux États-Unis, qui ont été consacrés principalement à lire les classiques américains. À mon retour, j’ai enseigné la philosophie dans diverses universités. J’ai rédigé une thèse d’esthétique, sur la créativité artistique. Puis, j’ai travaillé deux ans à l’inspection générale de la gendarmerie nationale comme déontologue. Et, finalement, je me suis lancé dans l’édition en créant les Forges. L’édition est ma troisième vie professionnelle – mais la première que j’envisage de poursuivre le plus longtemps possible.
A. G. – Aux Forges de Vulcain naissent en 2010. Un vieux rêve qui se réalise ? Un pari ? Un défi ? Arrives-tu à en vivre aujourd’hui ?
D. M. – Je me suis très souvent retrouvé dans la situation d’aider d’autres personnes à produire et diffuser leurs travaux, que ce soit en participant à des revues, au lycée, ou à l’université – ou en étant membre de troupes de théâtre. Ces activités extrascolaires ont toujours été envahissantes, jusqu’au jour où je les ai laissé prendre le contrôle de mes journées : j’ai renoncé aux diverses carrières qui se dessinaient devant moi pour faire toute la journée ce que je faisais, sur mon temps libre, la nuit et les dimanches, avec plus de plaisir et d’enthousiasme que ce que j’étais censé faire. En outre, l’édition me semblait une manière plus efficace que l’enseignement pour contribuer à la conversation collective. Tout simplement car je fixais à l’enseignement une fin qui n’est pas la sienne : influencer la discussion. En toute lucidité, je crois qu’il y a aussi dans ce choix de devenir éditeur un désir d’autonomie. Mon passage par la gendarmerie fut d’ailleurs très révélateur : je travaillais dans un service où, objectivement, les personnes étaient extrêmement compétentes et moralement bonnes, mais le fait d’avoir un chef, même un très bon chef, je le vivais mal. Créer les Forges, c’était comme créer une micro-nation indépendante. Petite, mais sans comptes à rendre. Je vis à peu près des Forges, même si mon revenu est bien plus faible que celui que j’avais dans mes précédentes missions. Mais c’est souvent le cas des entrepreneurs et entrepreneuses : ils et elles gagnent moins que ce que leurs diplômes pouvaient laisser espérer – mais ils et elles sont plus épanoui(e)s.
A. G. – Ouvrir une maison d’édition est un désir assez fréquent, mais j’imagine qu’il y a deux trois trucs absolument pas drôles auxquels il faut penser. Très concrètement, combien ça coûte, comment trouver un distributeur, comment se faire connaître, comment survivre ? (oui, ça fait quatre questions en une, je sais, je sais)
D. M. – Avec le temps, je me dis qu’il faut être à la fois très idéaliste et très pragmatique. Idéaliste, histoire de faire les choses pour des bonnes raisons, ce genre de raisons qui vous réchauffent quand il fait froid. Et très pragmatique : il faut essayer de voir les étapes concrètes qui mènent à l’idéal. Les maisons d’édition peuvent échouer par manque de réalisme… mais aussi par manque d’idéalisme. Que serait une maison d’édition qui tournerait mais ferait des livres sans intérêt ? L’histoire concrète des Forges est atypique – principalement en raison des sévères lacunes que j’avais quand je me suis lancé : lacunes techniques, professionnelles. Je ne connaissais pas grand-chose des métiers de l’édition. Habituellement, les maisons de l’édition se structurent de manière industrielle. En gros, les fondatrices ou fondateurs savent où ils doivent aller, donc, ils construisent les moyens à rebours. Ils se disent je veux être là, donc j’ai besoin de ceci et de cela. Les Forges se sont davantage interrogées sur les moyens qu’elles possédaient, et se sont structurées de manière plus organique, moins industrielle. Par exemple, au début, je faisais tout. Je sortais des livres imparfaits, récoltais des avis, des suggestions, intégrais les corrections dans chaque livre. Encore aujourd’hui, après cent livres, chaque nouveau livre intègre des améliorations par rapport au précédent. En ce sens, les Forges ont une culture du perfectionnement qui explique que c’est une maison qui, malgré les revers, reste une maison qui, année après année, grandit. Ce n’est qu’au bout de trois ans que nous avons eu un diffuseur-distributeur. Nous sommes restés presque trois ans chez lui. Trois années pas follement réussies, mais sources de beaucoup d’apprentissages. Puis, nous avons connu un deuxième diffuseur, avec qui cela s’est très bien passé. Et là, nous venons de passer chez un troisième partenaire, qui semble parfait pour nous. Revenons à ta question. Combien cela coûte ? comment survivre ? Difficile de répondre. Je pense qu’il existe toutes sortes d’outils qui permettent de se lancer aujourd’hui avec un budget nul. Mais il faut être prêt à se battre, à s’améliorer, à suer. Et il faut garder à l’esprit qu’un bon éditeur ou une bonne éditrice n’est pas une personne qui sait produire de bons textes… c’est une personne qui sait trouver les bons lecteurs aux bons textes. On peut faire du numérique, de l’impression à la demande, de la communication digitale, etc. Par contre, à un moment précis, quand on a trouvé un modèle qui fonctionne, il faut quitter ce mode de fonctionnement bricolé pour s’industrialiser : et là, il faut un diffuseur, un distributeur. Cela coûte, bien sûr. Mais si la maison a déjà publié, a déjà ses lecteurs et lectrices, c’est plus aisé. La diffusion permet de massifier quelque chose qui fonctionne déjà. Elle ne peut faire fonctionner quelque chose qui ne fonctionne pas. Souvent, les personnes issues des métiers du livre pensent qu’il est impossible de lancer une maison d’édition sans avoir, dès le premier jour, un diffuseur. Mais ce type d’approche est dangereux. Soit cela passe, soit cela casse. Cette approche me fait toujours penser au moment où, dans Le petit baigneur, on baptise un gros bateau qui vient d’être mis à l’eau en lançant une bouteille de champagne contre sa coque – et la coque se brise, et le bateau coule. Je suis partisan d’une approche plus… agile.
A. G. – Il y a très peu de temps, tu nous as avoué sur Facebook avoir réfléchi à ta ligne éditoriale, alors… dis-nous tout…
D. M. – La ligne éditoriale, c’est souvent présenté comme le trésor le plus important d’une maison. C’est principalement parce que, face à la profusion des livres, les journalistes, les libraires, ont besoin de se faire une idée, simple et rapide, de la raison d’être de telle ou telle maison, surtout si elle est nouvelle et méconnue. La ligne éditoriale des Forges, c’est comme leur modèle économique – c’est une chose qui s’est structurée naturellement, organiquement. Au début, les titres étaient juste les reflets de ma subjectivité. Pour les curieux, cela donnait quelque chose d’hétéroclite, où on trouvait à la fois des essais, des livres d’art, des romans, des romans poétiques, mais aussi des romans trash. Mais comme je sais être une seule personne, et que j’avais l’intuition de ne pas être une aberration sociologique, cela ne me gênait pas. La succession de titres me servait aussi à comprendre, peu à peu, mes goûts – et les tentatives régulières pour formuler cette ligne par écrit étaient autant de moyens de me rapprocher, peu à peu, de la clef de ma propre subjectivité. Ce fut un long chemin, mais le bénéfice de cette approche est que la ligne des Forges me semble à la fois originale et juste. Elle est un peu plus lisible et visible maintenant, après ces années de tâtonnements. Pour faire simple, les Forges, c’est de la littérature générale qui a un peu d’imagination, et de la littérature de genre qui a des ambitions littéraires. Plus précisément encore, les Forges de Vulcain, c’est du réalisme magique, de la SF littéraire, de la Fantasy littéraire, du fantastique littéraire. Voilà pour l’aspect pratique. Pour celles et ceux qui veulent aller plus loin, je dirais que l’espoir secret des Forges, c’est d’être un coin enfoncé dans les mauvaises habitudes des pratiques culturelles. Dans les pratiques culturelles, il y a ce mythe, du goût pur, d’un goût qui ne serait pas conditionné par autre chose que des considérations artistiques ou esthétiques. Or, bien souvent, toutes sortes d’autres considérations entrent en ligne de compte dans l’expérience de la lecture. Principalement, quand on lit, on anticipe un peu trop ce que cette lecture pourrait dire de nous aux autres. On manque de liberté sociale et on privilégie parfois les livres qui peuvent nous donner le sentiment d’être intelligents, fins ou moraux. Pourtant, ce qui est important, ce n’est pas de paraître fins, intelligents, moraux – ce qui est important, c’est de l’être, ou, du moins, de chercher à l’être. Il faut se dégager des enjeux sociaux de la lecture, reconquérir le goût personnel, éviter de tomber dans ce piège tendu par la société du commerce, qui cherche objectivement à détruire le goût individuel. Car, une fois détruit le goût, une fois détruite la capacité de chaque individu de s’affirmer en disant ce qu’il aime et ce qu’il méprise, alors, on peut tout lui imposer : on peut lui faire croire que tel livre est bon, alors qu’il est mauvais. Il n’y a rien que je déteste autant que les fois où une personne a aimé un texte, et vient prudemment me demander mon avis, et que je sens que je parviens à renverser son avis sur ledit texte. Si nous goûtons un texte, il doit être impossible de changer d’avis dessus. Le goût doit être comme le plaisir ou la douleur, des sensations primaires, aussi vrai que s’il était biologique. Je vais essayer d’être concret : Ursula K. Le Guin est une des plus grandes romancières de langue anglaise, elle est sans doute plus fine, plus poète, plus féministe, plus humaniste que bien des auteurs et autrices, mais elle demeure peu connue, car elle écrit principalement de la science-fiction (NB : Ursula K. Le Guin est décédée le lendemain de cette interview). Une de mes satisfactions personnelles : quand une lectrice me dit qu’elle ne lit que des textes réalistes, mais qu’elle a fait une exception pour le dernier roman de Gilles Marchand. Et qu’elle s’en trouve heureuse. Le découpage entre la littérature générale et la littérature de genre est un découpage socialement construit : initialement, le rejet de la littérature d’imagination, avec ses monstres et sa magie, reposait sur un projet politique – pour apprécier la littérature d’imagination, la littérature allégorique, il faut une certaine culture littéraire. Or, au 19ème siècle, les gens commencent à savoir lire, mais manquent de culture littéraire – les écrivains optent donc pour le naturalisme, qui est une littérature du peuple. Mais, aujourd’hui, les choses sont inversées : la littérature réaliste est une littérature assise, une littérature de gens assis. À l’inverse, ce minuscule acte de rébellion, qui consiste à travailler la frontière entre le genre et le général, c’est un acte de révolte – dont le caractère gênant est d’autant plus visible qu’il est refusé, ou ignoré. La ligne des Forges est en quelque sorte le rétablissement des pouvoirs de l’allégorie, qui a permis les œuvres les plus éloquentes du passé, comme Frankenstein, le Portrait de Dorian Gray, Jeckyl et Hyde. Et, indirectement, en faisant douter de ce qui est permis et souhaitable en littérature, de faire douter de ce qui est permis et souhaitable dans le monde social en général. Mais tout cela, c’est l’effet mineur recherché par les Forges. L’effet majeur reste : il faut que les livres soient bons et procurent de bonnes heures de lectures. Et puis, parfois, je me prends à douter : suis-je plus qu’un autre, ou qu’une autre, dégagé des enjeux sociaux de la lecture ? Peut-être que tout ce que je professe n’est que la protestation subjective d’un individu qui veut se singulariser, et n’y parvient que par ce genre de gesticulations. D’ailleurs, pourquoi jouer ainsi le redresseur de torts ? Pourquoi vouloir à tout prix changer les goûts des autres ? Après tout, le commerce, cela ne consiste pas à changer les goûts, mais à les cerner pour les satisfaire. C’est là où finit ma réponse sur la ligne des Forges et commence ma psychothérapie personnelle, je le crains…
A. G. – Tu reçois – j’imagine – de très nombreux manuscrits (ne parlons même pas des achats de droits étrangers, ou au contraire parlons-en si tu veux bien aussi lever le mystère pour les néophytes). Peux-tu répondre à l’angoisse du primo-auteur (voire le rassurer… ou pas) : comment se passe la sélection ? Combien de titres publies-tu par an ? Quels sont les critères ?
D. M. – Pour les romans étrangers, parfois des traducteurs et traductrices me les proposent, mais souvent, c’est moi qui les repère. J’ai une préférence pour les romans américains car je vois l’Amérique comme un miroir de la France – par exemple, aux États-Unis, le découpage entre les genres littéraires est différent car, tout simplement, la société est différente. Et, sur certains points, l’Amérique me semble plus démocratique. Ou, du moins, la circulation du capital symbolique, la charge imaginaire de la lecture, y sont différents. Parfois, ces romans étrangers me viennent d’agents ou agentes, qui parviennent à cerner mes aspirations. Pour les textes français, c’est plus simple. Je reçois environ 1800 manuscrits par an, au format numérique. Je fais un premier tri rapide où je ne lis généralement que quelques pages. Souvent, les manuscrits reçus n’ont aucun rapport avec la ligne des Forges. Parfois, la maîtrise de la langue est trop aléatoire. Parfois, le roman semble intéressant mais ressemble trop à un texte que nous avons déjà publié. À la fin, il reste une quarantaine de textes, que je lis en entier. Autant le premier tri est rapide, autant le second tri est très lent, et prend de longs mois. Parfois, de bons textes me passent sous le nez. Mais je me suis fait à deux choses : d’une part, je me trompe sans doute parfois quand j’écarte des textes, d’autre part, des textes m’échapperont. L’idée est de repérer trois à quatre textes. Puis, je rencontre les auteurs et autrices. J’essaye de les comprendre, et de savoir si nous travaillerons bien ensemble. Généralement, il ne reste qu’un ou deux textes à la fin. Ainsi, chaque année, je fais entrer deux auteurs en moyenne dans le catalogue. Les dix autres titres sont des titres étrangers ou des nouveautés d’auteurs et d’autrices que je suis, titre après titre, dans la construction de leur œuvre. Les critères pour sélectionner les textes des nouveaux et nouvelles sont : l’adhésion à la ligne, la maîtrise de l’histoire, le sens de la langue, la présence d’un propos. Ce sont des critères apparemment larges, mais il reste peu de textes à la fin…
A. G. – Aurais-tu des conseils judicieux à leur donner, aux jeunes auteurs ?
D. M. – Écrire ce qu’ils ou elles veulent écrire. Puis se relire. Se constituer un cercle de premiers lecteurs et lectrices pour recueillir des avis. Lire beaucoup. Tenir un journal.
A. G. – Les Forges font partie des jolies maisons indépendantes qui commencent à avoir une très belle réputation. Être éditeur, c’est être un bon communicant, savoir mettre ses auteurs en avant, miser sur la qualité des textes ou être un bon gestionnaire ? Comment lutter contre la multiplication des titres, comment se démarquer ?
D. M. – Il y a plein de façon de faire vivre une maison indépendante. Disons que dans une structure de petite taille, la maison a les traits de caractère de sa fondatrice ou de son fondateur. Même si une éditrice ou un éditeur doit savoir un peu tout faire, on finit par privilégier ce que l’on aime faire. Certaines maisons communiquent beaucoup, d’autres peu, certaines ont une gestion exceptionnelle, d’autres font juste ce qu’il faut. Les Forges vivent grâce à une espérance : que notre ligne est en fait attendue, qu’elle répond à une aspiration générationnelle, de lecteurs et lectrices né(e)s à la lecture avec Harry Potter, les jeux vidéos, les jeux de rôle, et qui, en creusant et approfondissant leur goût, ne renoncent pas complètement à leur enfance, mais la reprennent, cherchent à l’étendre, à la posséder – c’est cela le rétablissement des pouvoirs de l’allégorie. Si la ligne répond à cette aspiration, le reste suivra.
A. G. – Par ailleurs, tu as créé DraftQuest, peux-tu nous présenter ce projet ?
D. M. – Je reçois beaucoup de manuscrits et ces propositions sont souvent assorties de deux demandes. Demande d’être publié ou, si la publication n’est pas à l’ordre du jour, demande d’un avis professionnel. Or, je ne peux pas donner cet avis. D’une part, cela demanderait trop de temps. D’autre part, ce n’est pas le métier d’un éditeur : un éditeur travaille pour les lecteurs et lectrices… et accessoirement pour les auteurs et autrices qu’il publie. Pas pour ceux et celles qu’il ne publie pas. Mais je ressentais un certain dépit : la lecture de certaines erreurs récurrentes me faisait penser qu’il y avait quelque chose à faire, une aide à apporter, simplement pour pousser les personnes à mieux écrire, à ne pas désespérer, à voir l’écriture comme un apprentissage – quelque chose qui ne s’enseigne pas, mais qui s’apprend, par l’exercice et la réflexion. J’ai donc créé DraftQuest, qui œuvre à encourager tout le monde à écrire, à se former. C’est un petit site Internet, qui dématérialise diverses idées et pratiques que l’on trouve dans les ateliers d’écriture et les manuels d’écriture. C’est gratuit car c’est une manière de donner à la communauté. Environ dix mille personnes ont déjà utilisé le site. Et quelques dizaines de romans ont été écrits à la faveur de DraftQuest. Je dis « à la faveur », car, finalement, DraftQuest a juste donné une petite étincelle – les participants et participantes de cette expérience avaient déjà la passion de l’écriture en eux : il fallait juste souffler sur les braises.
A. G. – Je crois que tu vas bientôt faire paraître un jeune auteur talentueux que j’avais eu le plaisir de rencontrer à Paris. Qu’est-ce que les Forges nous préparent, quel est le programme à suivre ? Donne-nous envie, fais-nous rêver !
D. M. – L’auteur dont tu parles est Frank Thomas, dont le premier roman, La Fin du monde est plus compliquée que prévu, sort en mai 2018. Avant cela, deux autres premiers romans sortent ce printemps. Contretemps de Charles Marie, une sorte de policier fantastique et poétique, très wildien. Et Uter Pandragon de Thomas Spok, une redécouverte de la matière du Graal qui est à la fois très littéraire et très épique. Quant au roman de Frank Thomas, c’est une sorte de vaudeville, mâtiné d’humour anglais, plein de fantaisie, qui lorgne vers la comédie classique, et les meilleures séries américaines. Sous l’apparente variété de ces trois romans, il y a comme une profonde affinité entre ces trois romanciers, qui sont aux débuts de leurs œuvres, et qui se nourrissent d’autres arts : la peinture, la bande-dessinée, le cinéma, la télévision – tout en prenant la littérature au sérieux. Ils incarnent une nouvelle génération, pas simplement par leur jeunesse (ils ont chacun une petite trentaine d’années), mais aussi par leur liberté esthétique.
A. G. – Question subsidiaire : quand aura-t-on le plaisir de te lire TOI ?
D. M. – Ah ah ! Eh bien, il me semble qu’au regard de ce long entretien, on a lu suffisamment de moi pour quelques temps… Tout le monde devrait écrire – moi, comme les autres. Mais tout le monde ne devrait pas publier. J’aime écrire dans le métro, sur mon téléphone portable, pour amuser mes amies et amis. Je n’arrive pas toujours à les distraire, mais parfois, je devine qu’ils sourient en lisant ces fictions naines. Mais je n’ai pas envie, pour l’instant, d’aller plus loin. Je crois qu’écrire, faire œuvre, et publier, reste un acte qui impose un engagement existentiel que je ne ressens pas. Donc, mes amis peuvent me lire… mais mon existence publique restera, pour encore quelques temps, celui d’un éditeur, qui essaye d’accompagner auteurs et autrices dans la construction de leurs œuvres.