Le pitch tient en trois lignes : cinq « amis » (faut le dire vite) décident de passer le réveillon du Nouvel An ensemble. Pour pimenter le tout (et donner une raison d’être à ce court roman), ils décident d’exaucer le vœu de chacun d’entre eux. Évidemment, je ne peux pas vous en dire plus, ni vous dévoiler ces vœux farfelus, juste vous préciser que le « délire » va monter crescendo et se terminer en apothéose. Il n y pas toujours besoin de s’encombrer de fumeuses théories, de trips pseudo-philosophiques ou de situations alambiquées pour pondre une histoire originale. Parfois, une simple bonne idée de départ et le plaisir de la dérouler jusqu’à l’absurde peuvent suffire. Dont acte.
Nous nous étions mis d’accord sur les limites à respecter. Il n’y en aurait aucune. Nous pourrions tout demander, mais une chose, une seule. La corne du rhinocéros que nous avions frottée en entrant ferait office de lampe à huile magique. Nous serions tous Aladin. Nous serions tous le Génie. Qu’allait demander Ninon ? S’envoyer en l’air avec des inconnus pendant qu’on la materait ? Et Madame Louise ? Retourner dans le village qui l’a vu naître ? S’immerger dans une séance de spiritisme pour communiquer avec son défunt mari ? Lui dire qu’elle le rejoindrait bientôt ? Écouter l’intégrale de Tino Rossi ?
Toujours encline à me laisser surprendre, j’avoue que ce roman aurait pu me séduire. C’était sans compter une vulgarité crasse qui m’a franchement rebutée. Sans faire ma Française vieille France, j’avoue que je préfère lire « prostituée » que « pute », « testicule » que « couille », « sperme » que « foutre », et autres formules du même acabit. De la même manière, je me passe allègrement d’un « putain » ou d’un « enculé » à chaque page (surtout quand lesdites pages sont de petit format, à peine 12cm. x 17cm.). Quand le grivois sert le propos, d’accord. Je ne vais pas me la jouer oie blanche. Mais quand la surenchère n’a pour but que de choquer, je me dis que j’ai – franchement – passé l’âge. C’est donc avec circonspection que je suis arrivée au terme de ces 129 pages (je suis très détails techniques aujourd’hui), sans avoir desserré une seule fois les mâchoires (douloureux).
– On croyait que vous vous étiez dégonflés.
— Tu croyais, Patrick a précisé.
— Comment ça s’est passé, avec Stella ?
— Mal, j’ai répondu, en effleurant la corne du rhino.
— Bien, a fait Ninon. On commence ?
— On commence, a confirmé Madame Louise.
Encore fallait-il savoir par qui commencer.
La loi de l’ancienneté voulait que Madame Louise se lance la première, sauf que la loi de l’ancienneté, nous nous la mettions tous au cul. Ninon pouvait également prétendre à passer devant les autres car elle était la seule fille de la bande. Madame Louise était une dame, nuance. Je ne pouvais cependant invoquer le concept de la galanterie, elle m’aurait balancé sa bière dans la gueule. Patrick ? Je redoutais de lui faire cet honneur. Il était préférable de commencer doucement. Par moi ? Je me réservais pour la fin. Benez ? Pourquoi pas…
— Vas-y. Fais ton vœu, je lui ai lancé.
D’Antonoff, je ne sais rien, à part qu’il s’agit là de son premier roman, et qu’il est né en France (mais vit à Lausanne) (pointilleuse certes, mais je vous tairai en quelle année). Je ne connais pas la couleur de son passeport, et ne crois pas que ce soit cela qui colore son humour. Il est par contre certain qu’il y a dans ce roman une ambiance franchouillarde (et qu’on y parle en euros, restons précis) qui plante le décor. Quelles sont ses références (à part les dessins animés qu’il nous case à chaque bonus) (car oui, entre deux chapitres, il y a aussi des bonus), quel était son objectif ? De la gouaille à la Tontons flingueurs ? Peut-être. Résultat mitigé pour ma part, la goguenardise et la grossièreté ont peut-être une frontière commune, mais que chacune reste à sa place et les lecteurs seront bien gardés.
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